Pour la quasi-totalité des habitants du village, le nom de cette personne n’évoquera rien.
Monsieur BIRAN a été le dernier instituteur de l’école primaire de la commune où il exerça cette fonction de 1969 à 1981 soit un an avant sa fermeture définitive.
Il fut mon instituteur comme celui d’autres enfants de ma génération à qui je pense aujourd’hui. Une époque révolue et, à mon plus grand regret, notre école ne rouvrira pas. Cette fermeture a résonné en moi, pendant de très nombreuses années, comme une déchirure. En effet, un village sans école n’en est pas tout à fait un. Entendre les cris des enfants lors de récréations est vecteur de vie.
De ce lieu, il ne reste rien ou si peu, hormis la mémoire de l’école que nous fréquentions. Quelques symboles forts néanmoins témoignent de sa présence : l’horloge électrique qui s’est arrêtée à 16 heures. Cette heure me remplissait de joie car elle indiquait que bientôt nous retournerions ensemble jouer dans les rues, places, prairies (encore existantes et entretenues) et les bois que comptent notre territoire… Souvenirs aussi des lieux : l’armoire en bois fixée au mur, rustique pharmacie, dans laquelle étaient rangés divers produits de première urgence, son homologue contenant les poids et les mesures ainsi que la plaque commémorative à la mémoire des instituteurs Morts pour la France. Comptait aussi ce parquet en bois dont nous prenions grand soin par égard à celui qui, en guise de punition parfois, devait le frotter à la paille de fer avant de le cirer. Nous marchions donc sur des patins pour qu’il ne se salisse pas trop… Il existait ainsi entre nous une solidarité qui permettait de ne pas trop alourdir la tâche de celle ou celui qui serait charger de le nettoyer.
Son épouse, Nicole, nous dispensait des cours de travaux pratiques et nous pratiquions avec elle le chant. Des moments inoubliables, il va de soi. Je me souviens de certaines comptines dont celle-ci : « Colchiques dans les prés, fleurissent, fleurissent, colchiques dans les près, c’est la fin de l’été » qui alimentaient notre imaginaire. Debout, nous apercevions l’arête de la toiture du château. Là, les nuages filaient au gré du vent et je partais en voyage. Assis à ma table, mon regard s’échappait parfois par la fenêtre à gauche de la classe et laissait apparaître au loin, les vergers et au-delà, les champs : la liberté.
L’école n’a jamais compté qu’une seule et unique classe : de la section enfantine (3ème année de maternelle) jusqu’à celle de CM2. La vingtaine d’enfants d’âges différents cohabitait sans aucun souci. Un autre temps. Monsieur BIRAN dirigeait avec une rigueur indispensable, les cours de la journée. Il faut dire que même les plus médiocres d’entre nous (j’en étais), possédaient des bases scolaires solides en quittant notre école et se retrouvaient, une fois au collège, bons élèves ou en tout cas, bien meilleurs que d’autres.
Nous devons témoigner à Serge BIRAN notre gratitude et lui adresser nos remerciements. Il ne s’agit pas d’idéaliser un passé révolu et faire l’impasse sur certaines failles. Mais cette école a permis à beaucoup d’entre nous, de nous construire et de devenir des adultes. C’est ce que je retiens en partie au même titre que la qualité d’apprentissage que nous a transmis notre instituteur.
Notre village plus que millénaire est constitué d’immenses étendues sur le plateau du Vexin et dont la surface est plus importante que celle de certaines autres communes alentour. Ses chemins et sentiers, ses cours d’eau et fontaines, ses vallées, bois, prairies, ses monuments, le château, l’église et la mairie, ses bâtisses telles que les fermes et autres maisons « caractéristiques » du Vexin en témoignent et lui donnent un caractère fort. Mais ce village ne serait rien s’il n’était pas constitué de ses habitants, femmes, hommes et enfants qui se sont succédés de génération en génération tout au long des siècles.
A n’en point douter, Monsieur BIRAN aura contribué à le faire vivre.
Je présente toutes mes condoléances à ses enfants, à sa famille et à ses proches.
Philippe HOUDAILLE – maire.
A ses instituteurs et à ses institutrices,
d’Antoine ROUDET, soldat de la première heure et traversant toute la première guerre mondiale, mort en 1919
A Serge BIRAN, instituteur du village de 1969 à 1981,
La commune de Moussy reconnaissante.
Nota :
En 1833, la commune de Moussy est réunie, pour l’instruction primaire à Commeny. Elle y reste jusqu’en 1869. A cette époque, le conseil municipal de Moussy vote la création d’une école à Moussy. A partir de cette date, les instituteurs résident dans la commune. L’école aura lieu d’abord dans des locaux appartenant à des habitants et en 1876, dans la maison actuelle au centre du village (la réception définitive des travaux a eu lieu le 12 mai 1877). Le terrain de 10 ares, sur lequel la mairie-école de Moussy est bâtie, fut acquis en 1875.
Après le départ de Serge BIRAN, Madame ROUGIER assure la fonction d’institutrice pendant 1 an. L’école ferma définitivement en 1982.